CONTRIBUTION de Noële BARBOT

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Lettre à Georges Didier du magazine Réel

Titre : Réflexion d’une psychothérapeute sur l’idée de parrainage d’un enfant de la Shoah

A l’attention du Président de la République


Monsieur le Président, je vous fais une lettre

Que vous lirez, peut-être, si vous avez le temps…

J’exerce la profession de psychothérapeute et j’anime régulièrement des stages de « constellations familiales ».

Pour renseigner le lecteur et lui expliquer en quoi cela consiste, je cite d’abord des extraits du chapitre 12 de mon livre « Réveille-toi, tu ne dors pas ! » paru aux éditions Saint Martin :

CONSTELLATIONS FAMILIALES

« Un exemple véritablement sidérant de communication des inconscients est celui des constellations familiales.
Et tout d'abord comment se déroule une constellation ?
Une personne que nous allons prénommer Françoise va réaliser sa constellation.
Dans un groupe de 12 à 20 personnes qu'elle ne connaît pas, elle va tout d'abord choisir quelqu'un pour interpréter ou plus exactement représenter Françoise. De la même façon elle choisira parmi ces inconnus quelqu'un qui figurera son père, sa mère, ses frères et soeurs, éventuellement ses grands-parents ou encore toute autre personne importante dans sa vie. Elle va les placer sur scène de la manière dont elle voit les « représentants » les uns par rapport aux autres. Les personnes décédées peuvent également être représentées. On peut les faire figurer allongées sur le sol. Quelqu'un qui est vu comme très important pourra être placé debout sur une chaise par exemple, à l'inverse quelqu'un que l'on voit très discret pourra être assis.
Françoise va ensuite prendre un peu de distance pour observer les réactions des uns et des autres.
C'est là que le thérapeute intervient pour interroger chaque participant de la constellation sur son ressenti.
Chaque figurant exprime ce qu'il ressent et cela peut aller de la douleur physique à des émotions. Le figurant devient une sorte de double de la personne qu'il représente et il ressent ce que ressent cette personne.
Tout se passe comme s’il connaissait parfaitement celui ou celle qu'il représente. « … » La précision des ressentis est absolument sidérante.
Les secrets de famille jaillissent à la surface de la conscience.
Les similitudes observées entre deux personnes - personnages ne peuvent être le fruit du hasard. Elles mettent en évidence la communication des inconscients.
Il n'y a aucune limite ni de temps ni d'espace à cette communication. Le temps ne compte pas.
« … »

Tout se passe bien d'inconscient à inconscient. Selon moi, il est préférable que les personnes ne se connaissent pas du tout et n’aient en conscience aucun renseignement qui pourrait influencer leur ressenti.
Il est évident que le rôle du thérapeute est très important et notamment qu'il se doit d'être très respectueux des personnes.

« … » La constellation ouvre le rideau et met en scène ce que nous avons besoin de voir et de savoir pour continuer à avancer plus sereinement, avec une nouvelle possibilité de choisir notre vie.
L'objectif est de guérir le transgénérationnel. Il ne s'agit pas de faire du voyeurisme ni de sortir « les cadavres du placard» par jeu.

Jung**, je le rappelle une fois de plus, disait : « tout ce qui ne parvient pas à la conscience nous revient sous forme de destin ».

Il s'agit par cette prise de conscience d'éviter les répétitions douloureuses voire tragiques.
Les participants se rendent fréquemment compte qu'ils ne sont pas choisis par hasard dans la constellation des autres.
Le rang que nous occupons dans la fratrie peut se révéler d'une grande importance, surtout quand il n'est pas celui que nous croyons.
« … »

La constellation a permis de restituer sa place à cet enfant mort. Le participant qui avait été choisi pour symboliser cet aîné était censé lui-même être le premier de la fratrie. Son ressenti instantané a été que dans sa propre vie il était le deuxième.
Sa mère a pu lui confirmer une première grossesse avortée.

« L'intuition » des participants leur permet de ressentir les émotions, les maladies, les causes d'un décès, les désirs de se rapprocher, de s'éloigner... Parfois le métier de celui ou de celle qu'il représente mais cela peut aller jusqu'à trouver le prénom d'une personne.
Peut- t- il s'agir de coïncidences ?

Au vu de la fréquence d'informations « justes » recueillies à chaque stage que j'anime, je ne peux que constater que l'inconscient sait tout.
Cependant, je crois également que le même inconscient veille sur nous, qu'il nous protège et qu'il ne nous révèle que ce que nous sommes prêts à savoir.
Le lecteur aura compris que la participation à ce genre d'exercice n'est pas anodine.
Il est d'ailleurs très important que le thérapeute « redonne » à chacun sa véritable identité, à la fin de chaque exercice, afin que nul ne s'imprègne d'une énergie qui ne lui appartient pas…»

Et c’est précisément sur ce point que je veux insister car il est arrivé qu’une participante qui, le temps d’une constellation, avait été la représentante d’une autre femme, d’une autre famille que la sienne, rentre chez elle le soir et revienne en stage le lendemain, après une nuit très agitée et « imprégnée » totalement de l’énergie de la personne dont elle avait joué le rôle et dont elle ne s’était pas « séparée ».
Certes le « mal » a été vite réparé en redonnant à la participante la consigne pour que tout rentre dans l’ordre.

Mais que se passerait-il donc si un enfant de CM2 « s’imprégnait » de la vie d’un enfant victime de la Shoah ?

On voit bien en constellations que les défunts sont loin d’être des absents et que les enfants « captent » encore bien mieux que les adultes ce que j’appellerai les « énergies » présentes dans l’inconscient collectif.

J’invite donc à beaucoup de prudence tous les partisans du POUR afin que les nuits de nos enfants continuent d’être habitées de beaux rêves. Si une telle mesure devait être effective je crois sincèrement que beaucoup de parents s’inquièteraient des cauchemars de leurs enfants.
Pourquoi ne pas favoriser la communication de vivant à vivant ? La pratique de « correspondre » avec un enfant d’ailleurs peut s’amplifier.
Laissons aux adultes le soin de réfléchir à d’autres solutions pour honorer la mémoire des disparus et faire parvenir à la conscience les valeurs de respect de l’humain pour que celles-ci ne soient pas condamnées à revenir « sous forme de destin ».

Noële Barbot Lille, le 18 février 2008.

 

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